Épisode #8 : Enjeux environnementaux du design des services numériques

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Transcription

Marine Boudeau - Cheffe du pôle design des services numériques à la Dinum

Nous sommes habitués à comprendre la croissance comme le seul moyen de nous tirer d’affaire en oubliant les destructions qu’elle cause, alors que la prospérité a toujours dépendu des pratiques d’engendrement. Il ne s’agit pas de « décroître » mais d’enfin prospérer. Et, pourtant, aucun réflexe conditionné, aucun instinct, aucun affect ne traduit encore un tel basculement au point d’être devenu le nouveau sens commun. »

Ce n’est pas moi qui dit cela, c’est Bruno Latour et Nikolaj Schultz dans leur Mémo sur la nouvelle classe écologique.

En 2022, rien n’est plus facile que de produire des produits et services numériques. Vous vous réveillez un matin avec une nouvelle idée ? Pas de problème.
D’ici à la fin de la journée, elle peut être en ligne, accessible au monde entier.
C’est concret, immédiat, c’est. on peut le dire. magique !

Internet, et le numérique tel qu’il existe aujourd’hui, c’est avant tout une chance : un accès à des milliards d’informations et de services, partout dans le monde : communication, culture, éducation, services publics, des avancées en matière de santé, de nouvelles capacités de travail, et plus encore.

Mais le souci, c’est qu’il est tellement facile de produire du numérique aujourd’hui, qu’il est souvent produit à la chaine, sans prendre en compte son impact sur l’habitabilité de la planète.

On peut faire mieux. Faire mieux, tout en faisant moins.
Questionner la pertinence de ce qu’on engendre ; et s’assurer que ces objets - produits, services, infrastructures - soient accessibles au plus grand nombre.

C’est ça un numérique responsable : un numérique pertinent, inclusif, protecteur, émancipateur et soutenable, qui rendra vos utilisateurs heureux et vos utilisatrices heureuses, et vos équipes fières.

Un numérique pertinent :

  • utile : il doit apporter une solution adaptée à un besoin concret
  • utilisable : il doit pouvoir être utilisé sans entrave et en toute situation
  • simple : il ne requiert pas de compétences particulières et il est rapidement complété.

Un numérique inclusif, qui prenne en compte :

  • les handicaps, à travers l’accessibilité numérique
  • les usagers dans leur diversité
  • les disparités d’aisance avec l’usage du numérique
  • le langage, qui doit être clair et compréhensible
  • les diversités d’équipements et d’accès au réseau.

Un numérique protecteur :

  • fiable, et qui assure la sécurité des informations
  • transparent, explicitant le fonctionnement du service
  • souverain, qui protège les données, les libertés et la vie privée
  • qui minimise la sollicitation de l’attention

Un numérique émancipateur

  • qui permet de renforcer et maintenir l’autonomie des personnes
  • qui donne facilite les choix et la contestation

Et enfin un numérique soutenable

  • qui soit sobre, de la conception du système technique à l’interface
  • qui perdure dans le temps malgré l’évolution des matériels et technologies
  • qui est ouvert et réutilisable par d’autres
  • qui est soutenable économiquement et pérenne.

En ça, le design et les designers sont essentiels, parmi d’autres.

Le but du design, c’est d’améliorer ou maintenir l’habitabilité du monde, comme le dit bien Alain Findeli. Et designer, c’est avant tout se poser des questions. Questionner une fonctionnalité, questionner un service ou questionner une politique publique. Rendre l’objet réel et désirable. Et puis en continu, améliorer sa pertinence et simplifier son accès.

Alors, vous attendez quoi ?

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