Épisode #15 : Comment déployer une stratégie d'écoresponsabilité numérique

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Transcription

Brigitte Tran, conseillère SI au département de la Stratégie et du Pilotage Numérique au Ministère de la Culture

Stratégie d’éco-responsabilité numérique. Oui ! mais qu’est-ce que cela veut dire en terme d’action ?

Aujourd’hui les mots comme « sobriété numérique », « développement durable », « Green Tech » sont partout. C’est à la fois rassurant car cela diagnostique d’un éveil écologique et en même temps lorsqu’on se penche sur la question d’un peu plus près, c’est difficile de s’y retrouver.

Aller vers un numérique plus responsable est très vaste et j’aime à rappeler que c’est avant tout un sujet humain. C’est un paradoxe car on aurait tendance à penser que cela relève des systèmes d’information et donc du périmètre informatique, mais réalité pas que ☺

Avant de parler de sobriété numérique il faut prendre la mesure des impacts de cette industrie dont la pollution explose. Or, c’est difficile car on a tendance à confondre « virtuel » et « immatériel ». Pourtant le numérique contribue aujourd’hui, au niveau mondial, à 3% des émissions de gaz à effet de serre, soit l’équivalent du secteur aérien. Et ces effets se développent à vive allure, puisqu’ils devraient atteindre le double, d’ici 2025.

Le numérique participe à la destruction de nombreux écosystèmes :

  • Il faut savoir que de 20taines de milliers km de câbles (qui peuvent s’étendre par exemple de la Malaisie à la Californie) et qui représentent toute l’infrastructure du réseau Internet, détruisent les fonds marins.
  • Il y a toutes les décharges à ciel ouvert, remplies d’appareils numériques usagés et non recyclables (entre autres au Congo).
  • Ou encore des villes dites « villes-cancer » (en Chine), où l’extraction des terres rares est indispensables à la construction des équipements numériques. Equipements qui représentent selon l’Ademe près de 50% des émissions de gaz à effets de serre, du secteur.
  • Sans oublier les data-centres qui représentent 4500 centres répartis dans 122 pays, et où sont stockés toutes les données. On produirait actuellement 2,5 trillions d’octets de données par jour ! que nous consommons massivement (au travers des réseaux-sociaux, mais aussi de plateformes de films, jeux-vidéos ou encore musiques « à la demande »).
  • Enfin il y a les satellites envoyés dans l’Espace, qui représentent une pollution difficilement mesurable.

En fait, la portée d’un seul usage individuel est mondiale.

En tant qu’institution, la première chose à faire c’est évidemment d’élaborer une stratégie « État » commune. La problématique majeure consiste à opérer cette transition écologique, à la fois dans une dynamique d’innovation, tout en allant vers la sobriété. Il s’agit d’un travail complexe. Pour cela nous avons travaillé en comités interministériels, sous le pilotage de la DINUM, afin d’élaborer un document de référence pour les organisations : « Le guide de bonnes pratiques numérique responsable ».

Au Ministère de la Culture nous nous sommes par ailleurs engagés en élaborant un plan d’action, afin de réduire les impacts environnementaux numériques. Ainsi on réalise que cela concerne beaucoup de monde ! C’est pourquoi des services transverses comme les missions achats, les ressources humaines, la communication, les services généraux… sont également impliqués dans la mise en action de la stratégie numérique. Dès lors il faut s’organiser.

Les départements du Service du Numérique se sont associés pour agir et nous nous sommes appuyés sur le guide, qui est un des leviers essentiels pour accompagner la mise en œuvre de la démarche et agir de façon coordonnée.

Bien sûr chacun doit pouvoir s’organiser selon ses propres spécificités structurelles. Cet outil permet cependant la réflexion selon un référentiel commun, et surtout une action nationale conditionnée par le respect, de certains principes fondamentaux.