Qu’est-ce que le numérique responsable ?

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La transformation numérique bouleverse les organisations et nos sociétés. Or le numérique n’est pas une industrie immatérielle. Afin que les effets positifs du numérique ne soient pas annulés par les effets rebond induits, il est important de mesurer son empreinte et de mettre en place une démarche d’un numérique plus responsable.

Le numérique responsable est une démarche d’amélioration continue qui vise à améliorer l’empreinte écologique et sociale du numérique.

Le numérique responsable recouvre le Green IT pour réduire l’empreinte environnementale à l’échelle de la DSI, l’IT for green qui met le numérique au service du développement durable et la conception responsable des services numériques.

Mettre en place une démarche Numérique Responsable est une action positive sur de nombreux aspects :

Réduire l’impact environnemental

La production d’une voiture représente seulement 20% de son impact environnemental alors que plus de 80% est généré à l’usage, notamment à cause de la consommation de pétrole comme source d’énergie. Concernant le numérique, c’est exactement l’inverse. La fabrication représente jusqu’à 80% des impacts en tenant compte de différents indicateurs environnementaux. Pour réduire l’impact environnemental du numérique, il faut favoriser la soutenabilité de la production, encourager l’écoconception des équipements et éviter le renouvellement rapide des équipements. Il est nécessaire d’allonger la durée de vie des équipements en favorisant le ré-emploi et la réparabilité, de réduire les pollutions générées à la fabrication et de promouvoir l’écoconception des services numériques pour réduire leur contribution à l’obsolescence des terminaux. Sur ce point, il faut dissocier l’obsolescence due au matériel (« hardware ») de l’obsolescence logicielle (« software »). L’allongement de la durée de vie et d’utilisation des terminaux ne peut être effectif, que si l’évolution des logiciels le permet. En effet, nombre d’appareils encore parfaitement fonctionnels sont ralentis par les mises à jour, qui ont tendance à alourdir les logiciels, ou sont rendus obsolètes suite à l’arrêt du support technique logiciel.

Améliorer l’impact social

L’extraction des minerais nécessaires à la fabrication des équipements mobilise par exemple le travail d’enfants dans les mines de Cobalt en République Démocratique du Congo (plus de 40 000 selon Amnesty International en 2016). Les conditions de travail dans les usines de fabrication des composants et d’assemblage des équipements ne sont guère meilleures même si cela s’améliore depuis quelques années : cadence infernale, salaire très bas et conditions de travail dégradées. S’assurer, lors de l’achat, de l’éthique de tous les acteurs concernés par la fabrication des équipements, de l’extraction jusqu’au transport est donc un levier important pour améliorer l’impact social du numérique.

De plus, le numérique ne doit pas s’accompagner de l’exclusion de certaines populations : celles peu à l’aise avec les technologies numériques, celles habitant en zone blanche, celles avec une faible connexion ou encore celles ayant un handicap. Il s’agit donc de tendre vers des services publics numériques inclusifs : des services accessibles (application du RGAA, Règlement Général d’Amélioration de l’Accessibilité numérique), fonctionnant sur l’ensemble des terminaux des utilisateurs et adaptés à toutes les populations.

Levier d’économie financière

Mettre en place une démarche Numérique Responsable et réaliser des achats responsables ne coûte pas forcément plus cher. Au contraire. Cela peut même être un bon levier d’économie dans une approche de coût complet : coût d’acquisition, d’utilisation et de gestion en fin de vie.

En effet, les équipements et les services numériques sont changés lorsqu’ils deviennent trop lents. Ceux qui peuvent être mis à jour aisément ont une durée de vie supérieure. Ils peuvent s’adapter aux évolutions technologiques sans devoir les remplacer. C’est un des enjeux de l’écoconception des services numériques.

Ainsi les logiciels, les applications et sites web éco-conçus, c’est-à-dire conçus de façon à réduire le besoin en ressources informatiques tout en répondant au besoin utilisateur, auront tendance à durer bien plus longtemps, à condition d’être également évolutifs (mise à jour facile, montée en version des langages et frameworks sans devoir tout recoder…).

En se concentrant sur le besoin des utilisateurs, en rationalisant et mutualisant les ressources informatiques, des économies financières seront faites.

Levier d’innovation

Acheter, concevoir ou utiliser un service numérique dans un cadre budgétaire contraint peut être source d’innovation : comment « faire plus, quantitativement et mieux, qualitativement avec moins » ? Comment répondre exactement à nos besoins numériques en évitant la gabegie ? Ces « contraintes » peuvent être vues de manières plus positives comme des bonnes pratiques, des leviers d’innovation. Les termes « sobriété numérique », « frugalité numérique », parfois « basse technologie » (« low tech ») par opposition à « haute technologie » sont utilisés pour désigner des technologies simples, maitrisées et réparables.

Par exemple, « l’économie de la fonctionnalité » qui consiste à remplacer la notion de vente d’un bien ou d’un service par celle d’une performance d’usage est un paradigme intéressant.

Pensons également à toutes les opportunités liées à l’« émulation écologique » (« nudge thinking vert »), une « incitation, par effet d’entraînement au sein d’un groupe, à adopter un comportement plus respectueux de l’environnement ». C’est également un fort levier d’innovation pour les années à venir.

En matière d’achat, toutes ces approches sont prises en compte au stade de la définition du besoin. Elles concourent à optimiser le besoin, à le calibrer le plus justement possible en évitant notamment toute sur-spécification des matériels et en visant une adaptation la plus optimale possible à l’utilisation qui en sera faite.

Levier d’engagement

L’actualité est marquée par des évènements climatiques de plus en plus violents : ouragans, feux de forêts, canicules, sécheresses et crues dévastatrices. Le dérèglement climatique bouleverse de plus en plus notre quotidien. Au sein d’une démarche RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises), une démarche Numérique Responsable fonctionne en impliquant voire en engageant ses collaborateurs. Cela peut être une réponse à la quête de sens des collaborateurs qui sont avant tout des citoyens.

La recherche de sobriété numérique ne pourra qu’encourager à adopter des démarches de rationalisation de type LEAN (méthode de gestion « sans gaspillage ») et des approches Agile (collaboration, auto-organisation, itération, adaptation aux changements et amélioration continue), avec un haut degré d’adhésion des équipes, afin de répondre au juste besoin avec les moyens les plus adaptés et souvent les moins onéreux.

Le Numérique Responsable est souvent demandé dans une logique « bottom-up » (démarche ascendante), tant dans le secteur privé que dans le secteur public, par les équipes dédiées aux sujets environnementaux, par les informaticiens eux-mêmes, ou par les utilisateurs des outils qui se posent la question de leurs impacts environnementaux, souvent sans pouvoir trouver de réponse satisfaisante, que dans l’enseignement supérieur, universités comme écoles d’ingénieur où les étudiants demandent à recevoir des enseignements sur cette discipline.

Une démarche Numérique Responsable ne règlera certainement pas l’ensemble du problème mais elle en limitera au moins les effets, pour un avenir dans un monde plus soutenable et résilient.